Rivière-Salée au début du XXème siècle

Au début du XXème siècle, l’économie sucrière se maintient.
La canne à sucre est omniprésente. Six distilleries (RANLIN, DESPORTES, OZIER LA FONTAINE, BALMELLE, GELAGRE, EMMANUEL, ZONZON) fonctionnent.
Elles produisent du rhum tandis que les usines de Petit-Bourg et de Rivière-Salée fournissent le sucre.

Rivière-Salée est devenue à cette époque, le centre le pus dynamique du sud de la Martinique.

Comment se présentait cette localité ?

Les témoignages recueillis auprès des anciens permettent de s’en faire une idée assez nette.

A la rue Schœlcher, le bourg s’arrêtait au carrefour où sont implantées la parfumerie « TI BAUME » et la boucherie « LE PIED » ;

Au-delà, quelques maisons isolées ne formant pas véritablement corps avec le bourg : une maisonnette, propriété de M. Coulange Octave et qui était devenue un logement d’instituteurs, la maison-Binet (ex : B.N.P.) la gendarmerie. Cette partie de la commune était déjà la campagne.

Ce n’est que beaucoup plus tard qu’à été construit le quartier Courbaril, de la librairie saléenne jusqu’aux écoles.

D’ailleurs, lorsque le maire de l‘époque, Joinville Saint-Prix, décida d’y implanter l’actuel marché couvert, il déclencha un tollé général dans le bourg, les habitants se demandant « de qui avait pu se passer dans la tête de leur maire pour qu’il aille construire un marché jusqu’à… DESMARINIERES ! »

Rivière-salée Martinique - photos anciennes
Marché couvert à Riviere-Salée

Toute l’animation se concentrait dans la partie de la commune que nous appelons aujourd’hui « bas du bourg ». Magasins et épiceries y étaient installés. On retrouvait implantées sur ce tronçon de la rue Schœlcher, des succursales des grands magasins de Fort-de-France, Bidaut, Sans-Pareil, Reynoir, Marsan, Mauriello.

A l’Est s’étendait un bois de campêches, entre la rue des Etages et la partie marécageuse où à été implantée la station radio-électronique.

Ce bois faisait la joie des garnements du bourg. C’est là qu’ils passaient le plus clair de leur temps, quand arrivaient les fêtes de Pâques à tendre les pièges à crabes. D’autres jeux les occupaient lors des grandes vacances, débusquer à coup de pierres, le rats qui avaient élu domicile sous les frondaisons ou piéger les malheureux merles qui s’étaient laissés tenter par un appât hélas enrobé de glu.

Les rares rues étaient empierrées ; ailleurs rare aussi étaient les automobiles de la commune ; seulement trois : deux taxis, propriétés Eustache, et une autre appartenant à Madame Binet qui acceptait de faire quelques courses pour des clients de qualité. Les rues étaient éclairées aux réverbères – Grand Bourg ne sera électrifié que dans les années 35.36, Monsieur Marius Letord assurait l’allumage et l’extinction des réverbères. Il effectuait aussi le nettoyage des caniveaux. C’était un peu lui, l’horloge du bourg. Le bruit de sa pelle au fond des caniveaux annonçait le klaxon de la postale qui précédait de peu l’angelus du matin ; cette postale qui s’arrêtait devant le bureau de poste de l’époque, maison Desportes contigüe à celle des Nicar (Chez Malou) rythmait aussi la vie du bourg.

C’était M. Véronique, l’ancien maire du Diamant qui assurait le service entre Diamant et Fort-de-France.

Siège de l'Eclair de Rivière-salée Martinique - photos anciennes
Le marché en plein air – Photo : Coll. Fondation Clément

Le marché se tenait sur la place Gérald Pierre-Rose où se dressait un haut palmier planté dit-on, au moment de l’armistice. Dans un coin, celui qui jouxte le terrain des Beroard du côté de la rue des Etages, s’alignaient les étals de deux ou trois bouchers-Polidor, Beaudy, Louisy-Louis. Ce marché aligné était très animé, car Rivière-Salée était devenue un bourg très actif. Tous les dimanches, les habitants des communes de l’extrême sud venaient s’y approvisionner. Des Trois-Ilets, du Diamant, de Sainte-Luce, on venait acheter des légumes apportés sur mulets bâtés qui arrivaient de Rivière-Pilote, Saint-Esprit et même du Vauclin.

Cette place animait aux fêtes patronales avec les chevaux de bois de Monsieur Dolor, les multiples échoppes décorées de flamboyants où se pressaient paysans  endimanchés venus des mornes environnants, travailleurs des usines tentant leur chance aux multiples jeux de hasard, garnement effrontés échappés furtivement des bicoques, caressant un rêve fou : celui de goûter à tous ces bonheurs interdits.

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